-15%
Le deal à ne pas rater :
(Adhérents) LEGO® Icons 10318 Le Concorde
169.99 € 199.99 €
Voir le deal

Partagez
 

 [Concert sur le Saint-Virgile] Champagne !

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
Invité
Invité
Anonymous


[Concert sur le Saint-Virgile] Champagne ! Empty
MessageSujet: [Concert sur le Saint-Virgile] Champagne !   [Concert sur le Saint-Virgile] Champagne ! EmptySam 30 Juin - 10:46

L'après-midi précédant le Concert sur le Saint-Virgile avait été difficile pour Malone DuMaurier ; sélectionner son cavalier parmi les amis, et mécènes -voire les deux- était un sujet épineux à ne pas prendre à la légère.

Ainsi le gentilhomme prenait sa pipe et s'installait dans son fumoir, lové dans un fauteuil de cuir, sans oublier de se munir d'un opium à fameuse réputation qu'il était désireux d'essayer. Le narguilé, clé des domaines empiriques intérieurs et joyaux des chimères induites par ses nobles fantasmes, avait été sculpté par un artisan de renom et offert en guise de présent par un amant de jeunesse. Son bois exotique -rouge- et finition en or possédaient un charme primal, en dépit de sa perfection d’exécution, si sauvage et raffiné qu'il était à lui seul objet d'émerveillement.

Alors que la fumée jaillissait des narines de l'écrivain, il fronça les sourcils en une expression qu'un tiers observateur aurait jugée hilarante. Ses yeux se perdirent dans un brouillard voluptueux, théâtre de milles plaisirs, tandis que Malone songeait. Il cogitait à l'art et à la manière d'aborder un événement comme le Concert sur le Saint-Virgile, aux enjeux et à sa position vis à vis de toutes ces nécessités. Son plus proche mécène, et premier choix Edmund Beo, s'était entretenu avec lui au travers de missives a propos de la Cabale et les possibilités qui pouvaient s'offrir à eux. "Viser plus haut" avait-il proclamé d'une plume enflammée.

Edmund, l'Oisillon en col blanc qui lui avait fourni cet opium. Un brave homme que n'importe quelle femme rêverait d'épouser ; soigné et bien fait, au caractère assez tempéré pour être viril sans exaspérer, son mécène lui était cher. Le côté criminel achevait le tableau en une note dangereuse, terriblement attirante (et lucrative).
Toutefois les états d'âme de Sieur Beo possédaient un caractère excessif, grossi par la banalisation de la violence liée à ses occupations, qui les rendait quasi bestiaux dans leur essence. DuMaurier ne jouissait pas d'assez d'influence pour espérer chambouler le paysage Excelsien, et demain il danserait parmi les serpents.

Ce qui présentait ses avantages. L'observation du discret gratifiait de nombreux exemples, de trames à éviter, et d'histoires à raconter, il aurait par la suite tout le temps du monde pour songer à de meilleures ambitions. Si l'envie ne manquait pas, DuMaurier ne faillirait pas en prudence.

L'option d'inviter Edmund Beo fut donc écartée au profit d'une idée naissante.  

D'un bond félin, l'écrivain quitta son fauteuil et se dirigea plutôt en direction du bureau où, fidèles au poste, une plume et une feuille de papier se tenaient généralement prêtes à servir.
Chassant la considération du cavalier au profit d'une idée claire, DuMaurier commença à rédiger (non sans avoir rallumé sa pipe, devenant quelque dragon assis les jambes croisées).

Il y avait un Homme -le H majuscule est capital pour le qualifier- qui illuminait l'esprit du dramaturge. Cesare Calabresi ; le diable du Conservatoire, pensait-il. Tranchant et aussi moderne que ses œuvres, le moustachu séduisait Malone et ses projets, car ils étaient parfois amenés à se croiser dans leurs train de vie au District. Une bête étrange, un fauve extraordinaire qui fascinait à chaque fois DuMaurier. Rien de sentimental, mais la présence du peintre s'accompagnait souvent d'un magnétisme presque palpable.

En s'imprégnant de quelque souvenir dudit Sieur, en s'élevant vers un état de transe, ses doigts portèrent la mine encrée sur la feuille :

"Cher Cesare Calabresi,

Je me permets l'intrusion, en ma qualité d'étranger. Peut-être me ferez vous l'honneur de vous souvenir de ma personne à l'heure où vous lirez ces lignes. Malone DuMaurier, nous côtoyons le Conservatoire ensembles, et vous n'êtes pas sans ignorer les processus créatifs qui habitent (hantent?) chacun... Le mien m'amène aujourd'hui à désirer vous connaître. Quel théâtre est plus vraisemblable que celui du réel ? Telle est la question qui taraude présentement ma plume, et je pense que vos gestes, votre énergie, et cette moustache, portent leur part de réponse.
Comme vous êtes peintre, j'imagine que je me propose là d'emprunter votre substantielle moelle pour dresser un portrait quelque peu remanié pour convenir à une intrigue. Une bien étrange façon de vous proposer une rencontre, j'en conviens, les confrères artistes comprennent néanmoins plus aisément l'illusion des politesses ; l'art n'a jamais mieux avancé que lorsqu'il se fait irrévérent.

J'aime à penser que vous illustrez ce concept, si vous permettez l'utilisation de votre registre, et serais grandement honoré si vous m'accompagniez au concert sur le Saint-Virgile qui se tiendra demain en l'honneur de l'Amirale O'Fell au District Balnéaire.
Un personnage tout à fait intéressant, d'ailleurs, n'est-ce pas bon Cesare ?

Un ami m'a jadis dit que les personnages aux traits passionnés étaient les meilleurs amis des artistes. Car ils embrasent le monde, et les nôtres embellissent le moment. Une maxime qui sied à votre portrait du Comte Orlov, dont j'ai eu le privilège de respirer la violente beauté.

Vous me trouverez sur ce titanesque monstre de fer, demain donc, et me reconnaîtrez à la fleur de belladone qui ornera mon veston. Je comprendrais un refus, mais ma foi devrais reconnaître être fort malheureux en ce cas... un peintre devenu Muse est à lui seul prometteur d'une inspiration éternelle.

En espérant que la soirée de demain soit illuminée de votre présence,
"

D'un dernier mouvement de poignet, il termina son "e" d'une mine satisfaite et scella l'enveloppe sans plus attendre. La pipe dans une main et la missive dans l'autre il se dirigea ensuite vers les quartiers de son majordome, un homme au nom de Claude, dont l'âge égalait la sagesse, et lui demanda de porter attention aux ordres qu'il allait donner. Il faudrait porter la lettre à un orphelin bien précis, le Petit Georgie qui mendiait près d'une galerie d'art dans une ruelle adjacente à l'Opéra, et lui donner 20 ducats en spécifiant venir de la part d'un "ami". De main en main, de rue en rue, les orphelins sauraient trouver Cesare Calabresi. Le moyen s'avérait également important ; voir une lettre remise par ce biais informerait le peintre des alliances de DuMaurier. Ils partageaient un goût pour le danger.

Tous ces détours étaient impératifs ; la plupart des coursiers pouvaient être corrompus, et les orphelins n'y faisaient pas exception, mais de là à ce que quelqu'un soupçonne un marmot de transporter courrier important ils demeuraient l'option préférée de l'artiste pour communiquer sur des sujets délicats. Lorsqu'il eut terminé d'expliquer à Claude ses instructions, l'artiste lui demanda aussi de passer demain à un magasin bien particulier pour lui procurer une quantité suffisante de lait d'ânesse, afin que son bain ne jouisse de bienfaits corporels à la hauteur de l'événement du Saint-Virgile.

- Il en sera fait selon vos désirs, Monsieur. Quels vêtements souhaitez-vous porter ? Si je puis me permettre, le costume en tweed noir accompagné de votre chemise rouge ferait le meilleur effet...
- Tu es toujours aussi efficace, Claude. Vas pour ce costume, il faudrait également cirer les mocassins en cuir je te prie. Sur ce je m'en vais achever ma journée par un brin d'écriture et beaucoup de repos, la journée de demain demandera beaucoup d'énergie.
- Allez, jeune maître, je m'occupe de tout.

Dans le même élan de fumée aux odeurs boisées sur lequel Malone DuMaurier était entré dans le salon luxueux, il repartit de son pas agile vers ses appartements. Là, il passa une bonne partie de la soirée à piocher dans des petites boîtes dorées, examinant chacune de ses parures et bijoux -la plupart étaient des cadeaux- pour finalement s'arrêter sur un présent dudit Mécène Oisillon. Un collier représentant un visage de renard, en cuivre et rubis, aux divines finitions et une bague sertie d'un magnifique diamant rouge.

Le lendemain, après un bain où avait été incorporé son lait d'ânesse, l'artiste occupa presque toute sa journée à barboter dans l'eau tiède et rendue opaque par ses cosmétiques, réchauffée à espace réguliers, et parfumée de lilas. Malone DuMaurier avait appris par ses parents que les jeux politiques exigeaient une rigueur certaine soit-elle des apparences ou des comportements. Sa mère, Mirabelle DuMaurier ("Tirel" de son nom de jeune fille), en particulier lui avait appris comment charmer par les senteurs, envoûter par le discours, et séduire par la présence. Un bon bain était base cruciale à toute apparence.
Lorsque l'heure fut bientôt au départ et que Claude ordonna aux servants qu'on apprête une voiture, DuMaurier marchait nu dans sa chambre, veillant à ce que son habillage se fasse en douceur. Chaque détail comptait. La chemise rouge fut fermée jusqu'au dernier bouton, le pantalon ceinturé à la perfection, et le costume endossé avec fierté devant l'immense glace de plusieurs mètres qui lui servait de meilleur allié en ses circonstances.
Un jeune servant le coiffa, taillant quelques imperfections dans la chevelure tandis que sa barbe fut rasée de près.

DuMaurier n'était pas particulièrement inquiet en arrivant dans le District Balnéaire mais ne pouvait réprimer un sentiment d'anxiété croissant. Son père lui avait autrefois dit que la curiosité tuait moult chats, et que ceux-ci devaient veiller à prendre leur instinct en considération. La prudence avait de quoi ennuyer, mais elle était toujours nécessaire, aujourd'hui plus que jamais.

Lorsque le jeune blond, plus ravissant que jamais, sorti de sa voiture, il enfila une cape de soie noire et marcha à vive allure pour rejoindre le pont du Saint-Virgile.

Une fête à la hauteur des murmures, effrayante de sous-entendus. La glorification des forces armées était à son comble entre les déguisements des officiers -fort charmants pour certains- et les parures du navire de guerre. Tant mieux, se dit le dramaturge en jouant avec son collier alors que son autre main se saisissait d'un verre traversant ses alentours sur un plateau d'argent. Du champagne, et du bon !

- DuMaurier ? Vous ici ! Quelle joie m’empli !

La voix le fit se retourner pour tomber nez à nez avec Friedrich Alva, un médecin richissime qui soutenait ses œuvres. Il n'avait pas considéré l'inviter, non pas car sa bedaine quarantenaire avait de quoi rebuter, mais plutôt en raison de sa femme qu'il hissait haut dans le ciel lors des retrouvailles mondaines. Friedrich aimait beaucoup les jeunes hommes, mais tenait à conserver des airs saints, deux idéaux antithétiques.

- Mon bon Alva ! Ah, et je rencontre enfin Madame Alva. il se penche en un baise-main parfait. Ravissante.
- Laurie. Madame Alva est décédée l'année dernière. Tout le plaisir est pour moi, mon mari aime beaucoup à compter vos discussions... vous le fascinez à un point où j'en serais presque jalouse.

Oh si la douce savait... mais peut-être savait-elle ? Qu'importe, elle était vieille et bien que porteuse d'une beauté d'antan cette dernière déclinerait inexorablement. Malone lui décocha un sourire poli, et reposa ses yeux verts aux airs sereins sur le médecin.

- Hé bien ! La dernière fois que je vous ai vu habillé ainsi le pauvre Anthon Piscus s'est jeté du haut de sa chambre ! sa femme le fusille du regard. Une brimade, pardon.

Mais DuMaurier trouva cela réellement drôle et se mit à rire à son tour.

- Allons, madame, je connais votre mari et sais ne pas m'offusquer de ses paroles. Il est franc et parfois c'est là le plus grand régal qu'un homme peut faire à un autre, n'est-ce pas ?

Alors qu'il allait boire, guettant la réaction de Madame Alva à sa phrase, il entendit Maeva O'Fell déclarer le début des festivités et inviter les convives à se mouvoir vers la grande salle au travers des escaliers.

La foule était grande, mais les déplacements fluides, et bientôt DuMaurier en profitait pour se dérober à la présence de ce fastidieux personnage -bien qu'il eut été ravi de converser avec son épouse- pour marcher calmement vers l'endroit principal de toute cette fête.

Au cœur de la bête d'acier répondant au sobriquet de Saint-Virgile, Malone s'engouffrait plus profondément encore dans les machinations d'Excelsia, il s'aventurait dans la gueule du géant d'une allure sophistiquée, une coupe à la main, et la cape au vent. Des manières légères pour une lourde responsabilité.
S'il fallait donner un nom à ce qui se tramait en ses tropismes, ce serait l'excitation.

Lorsqu'il eut changé de verre, après avoir posé un regard de braise sur un serveur de son âge, il guetta la grande salle en quête de Cesare. Viendrait-il ? Il l'espérait, approcher sa sensationnelle moustache serait un honneur infini...  Pensa le dramaturge en sirotant pensivement son verre tandis que le serveur passait bien plus de fois que nécessaire autour de lui.
Ah, l'impétuosité virile des marins -un trait qui lui plaisait- s'avérait délicieuse. Pas tout de suite, toutefois. Pas encore. La soirée avait à peine commencé et beaucoup restait à faire.
Revenir en haut Aller en bas
 
[Concert sur le Saint-Virgile] Champagne !
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» [Concert sur le Saint-Virgile] D'or et d'acier
» [Concert sur le Saint-Virgile] Sandwich Princier
» [Concert sur le Saint-Virgile] Requiem allegro

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
 :: [RP] Excelsa Intérieure :: District Balnéaire-
Sauter vers: